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Publié le 16 Novembre 2016 – Auteur : Coline Mionnet

Sécheresse historique dans le Sud-Ouest des Etats Unis

Tandis qu’une horde de négationnistes du climat se prépare à investir la Maison Blanche, les Etats du Sud-Ouest américain subissent la plus importante sécheresse jamais enregistrée depuis plus de 40 ans.
La Californie et le Nevada sont les plus touchés par des vagues de chaleur et le manque de précipitations qui se conjuguent depuis cinq ans dans cette région, mais l’Arizona et l’Utah sont également sévèrement impactés.

Bien que les pluies d’automne aient abondamment arrosé la Côte Ouest depuis deux mois, les réservoirs naturels qui fournissent l’eau potable aux grandes agglomérations sont au plus bas, et les agriculteurs, qui ont déjà largement pompé dans les nappes phréatiques, se voient aujourd’hui imposer des restrictions et doivent parfois détruire les récoltes les plus exigeantes en eau. Plus de 2000 puits sont à sec dans la Great Valley, le cœur agricole de la Californie. Celui-ci est formé par les vallées de Sacramento et San Joaquin qui produisent la majeure partie de la production d’amandes, abricots, figues, kiwis, raisins et de nombreuses autres cultures très rentables mais également très exigeantes en eau. La contrepartie de cette agriculture intensive est la nécessité d’irriguer toujours plus ces cultures, qui consommeraient près de 80% du total des eaux prélevées dans la région.

La plupart des réservoirs en grand déficit

Le Lac Cachuma, qui alimente Santa Barbara en eau potable, a vu sa capacité réduite à 7%, comme le montre ces photos satellites, prises à 15 ans d’intervalle.

Le Lac San Antonio n’a pas été épargné, et son parc de loisirs, très apprécié des Californiens, a dû être fermé en 2015, son niveau s’étant effondré à 4% de sa capacité moyenne, ce qui n’était pas arrivé depuis 1967. Il a cependant été rouvert pour l’été 2016.

Ni le New Melones Lake:

Cette vidéo de 2014 montre l’importance de la sécheresse (YouTube)

Et ce montage montre les différences entre 2011 et 2014 sur les niveaux de plusieurs lacs californiens.

Cette situation catastrophique n’est pas sans rappeler la quasi disparition de la mer d’Aral dans les années 90.

Cette sécheresse historique provoque également de nombreux problèmes graves pour l’environnement et l’économie régionale :

La Californie a du faire face cette année à un nombre croissant d’incendies de forêts qui ont menacé et parfois détruit de nombreuses habitations ainsi que des centaines d’hectares de végétation. Selon les autorités californiennes, la fréquence et l’importance de ces incendies, souvent d’origine naturelle, ne cessent d’augmenter depuis 10 ans. Dans l’Ouest Américain, la durée de la saison des incendies est passée de 5 mois dans les années 70 à plus de 7 mois cette année, probablement à cause du réchauffement climatique. Le nombre de feux ayant détruit plus de 40 hectares de forêts est passé, en moyenne, de 140 dans les années 1980 à 250 ces dernières années.(Vidéo MAC ENTERTAINEMENT sur YouTube)

Le pompage intensif dans les nappes phréatiques pour l’irrigation et la déshumidification des sols entraînent des subsidences, notamment dans la vallée agricole de San Joaquin ou des affaissements du sol de 18 cm ont été relevés, menaçant les infrastructures.
La production agricole est en forte baisse, la valeur des exploitations s’effondre à cause de la perte de valeur foncière et/ou de la destruction de cultures, par exemple l’arrachage de plantations complètes d’amandiers.
L’agriculture californienne est un marché de 44 milliards de dollars, le manque à gagner estimé pour 2016 devrait s’élever à 2.2 milliards de dollars. 170.000 hectares de cultures ont été arrachées, et le quart de la production de riz, soit 57.000 hectares, a été perdu du fait de l’extrême sécheresse et de la pénurie en eau.
Des conséquences sanitaires apparaissent dans les régions rurales du fait le la mauvaise qualité de l’eau potable. Dans certaines zones, les habitants n’utilisent plus l’eau du robinet pour la boisson ni pour la cuisson, du fait de l’augmentation de sa concentration en polluants.
D’autre part, la production d’énergie hydroélectrique est affectée par le niveau critique des réservoirs qui ne permet pas une exploitation normale des centrales en toutes saisons.
Enfin, l’économie du tourisme d’été autour des lacs est fortement impactée par l’assèchement partiel des plans d’eau qui sont autant de bases nautiques ou de loisirs. La dernière saison d’hiver a été difficile, certaines stations ayant du ouvrir plus tard et fermer plus tôt, notamment en Californie du Sud.

Las Vegas, 2 millions d’habitants, 40 millions de touristes

Considéré il y a encore un an comme « le plus grand réservoir des Etats-Unis », le lac Mead, qui alimente Las Vegas en eau potable, a atteint son niveau le plus bas depuis 20 ans au printemps 2016, avant de remonter cet automne à son niveau de 2015. Soit une différence de plus de 40 mètres par rapport à son niveau initial, avec une capacité inférieure à 40%. Quant au barrage Hoover qui exploite les eaux du lac artificiel, sa production d’électricité a chuté de deux tiers en 2016. Des négociations sont en cours entre la Californie, le Nevada et l’Arizona pour adopter un programme de réduction de la consommation d’eau. Dans le même temps, les Etats situés en amont du Colorado, le Wyoming et le Colorado, réfléchissent à créer de nouveaux réservoirs pour sécuriser l’avenir de leur approvisionnement en eau, ce qui priverait les Etats situés en aval d’autant de ressources.
Si l’hiver n’apporte pas pluie et de neige en quantité substantielle, la ville de Las Vegas, une partie du Nevada et de l’Arizona pourraient connaître de graves difficultés d’approvisionnement en eau potable l’an prochain.

Les sports d’hiver menacés

“L’industrie du ski est confrontée à d’énormes défis et au moins 150 des 470 stations de ski actuelles aux Etats-Unis seront obligées de fermer les remontées mécaniques si elles ne trouvent pas d’autres activités que le ski à proposer,ou si elles n’installent des pistes artificielles.” Cette prévision de Bill Jenssen, expert de l’industrie du ski aux Etats-Unis, a jeté un froid à la réunion des Industries des Sports de Neige d’Amérique, SIA (Snowsports Industries of America) en janvier 2015 à Denver, Colorado. Selon son analyse, 150 des 470 stations de ski des Etats Unis sont condamnées à moyen terme par le manque de neige si elles ne prennent pas le pas de la diversification touristique.
Au 31 mars 2016, les précipitations n’atteignaient pas 60% de la moyenne sur une année. En Californie, certaines stations ont du fermer fin février, confirmant les prévisions de Bill Jenssen.
De plus, la saison avait commencé très tard du fait d’un mois de décembre anormalement doux.
A ce jour au 16 novembre 2016, aucune station de Californie n’a encore pu ouvrir, mais cela ne tardera peut-être pas vu les récentes chutes de neige observées sur les montagnes occidentales. Le seul moyen de survivre sur les plans touristique, économique et social pour ces stations et villages de montagne situés à basse et moyenne altitude est de se tourner vers la diversification touristique.